Le tirage à l’azote
Mercredi 19 juin 2013, par Service de la bière
//Pour les amateurs de Stout, le service au fût impose une technique particulière. Les clients de ce type de bière peuvent constater assez facilement que le service au bar est toujours effectué via un robinet différent des autres becs installés au comptoir.
On aime ou on aime pas, mais il est évident que ce style de bière ne laisse pas indifférent.
Très fréquemment on s’entend poser la question suivante : D’où vient cette mousse d’une consistance étrangement crémeuse que je trouve sur le haut de ma pinte ?
Elle est, entre autres, due au très faible taux de saturation en CO2 de cette bière.
Comment arriver à ce résultat ?
Pour le brasseur amateur, trois éléments semblent être déterminants pour espérer présenter convenablement une bière de ce type :
1) La carbonatation :
Souvent définies comme étant des bières « plates » ( vues d’ici…), les Stout sont effectivement bien moins carbonatées que les bières habituellement produites dans nos régions continentales. Il n’en demeure pas moins qu’une certaine pétillance, si petite soit elle, est bien perceptible et que ces bières sont bien loin d’être un breuvage « plat ».
Pour ce type de bière, un taux de saturation en CO2 de 0,3gr/litre peut être considéré comme étant correct.
2) Le robinet :
D’une construction particulière, il dispose d’un « mousseur » (une sorte de diaphragme calibré), dont la fonction est de faire en sorte que le verre ne se remplisse dans un premier temps que de mousse.
Après le tirage d’un verre de Stout on pense voir que la mousse ne retombe pas, mais qu’au contraire c’est la bière qui remonte, et ce d’une façon très inhabituelle. Etonnante apparition, il va sans dire, que cette lente et fascinante animation en cascade dans le verre. C’est un phénomène très distinctif, et le fameux effet « surge « , tant prôné par la marque leader de ce style de bière est souvent mis en avant pour son côté spectaculaire.
C’est véritablement une attraction visuelle dont on ne se lasse pas, pour peu que l’on soit amateur du style.
De plus, et si l’on y est un tant soit peu attentif, on peut lors du tirage percevoir à l’oreille un petit sifflement émanant du robinet. Ceci est très caractéristique de ce type de tirage, dû là aussi à ce fameux mousseur qui est intégré au robinet.
3) Le gaz :
Il s’agit en fait d’un mélange d’azote et de Co2, réservé particulièrement à certaines Stout et Irish Red, et disponible sous différentes appellations commerciales selon les fournisseurs (« Aligal », « Basifood », par exemple) qui sont proposés dans les proportions suivantes : 70% d’azote, et 30 % de CO2. La proportion majoritaire d’azote dans ce mélange est probablement faite dans le but d’éviter une augmentation de la saturation de la bière en CO2.
Le service au fût :
Une pinte de Stout se tire en deux temps. Le verre est approché du robinet, on ouvre le robinet « à fond » en tirant vers soi le levier pour remplir le verre aux ¾.
On pose alors le verre sur le zinc, le temps du fameux effet « surge », et l’on reprend le verre pour terminer la pinte en repoussant cette fois le levier, pour finir ce merveilleux col de mousse crémeux et si distinctif.
Etrange mousse, si particulière et inhabituelle, au point que certains barmans s’aventurent à y imprimer un trèfle pour y signer l’origine de cette bière.
Folklore, quand tu nous tiens…
Et concrètement, pour un brasseur amateur, ça donne quoi ?
Après deux présentations consécutives au public, force était de constater que malgré toutes les précautions prises à l’avance, le service au tirage en condition réelle n’a pas été chose facile. Par manque d’informations et d’expérience, les réglages avaient été faits « au juger » et n’avaient pas été très concluants…
Pour ce qui est des chiffres, la bière avait été saturée en CO2 à 0,3gr/litre, et la pression sur le détendeur réglée à 0,7bar. Le fût était au froid à 5°C.
L’attente pour un verre à peu près correct pouvait aller jusqu’à 10 minutes, ce qui n’était pas concevable, et on a donc cherché des raisons à cela.
Il y avait bien eu des soupçons sur la forme des verres à disposition (très hauts et très étroits), mais pas de solution de rechange à ce moment-là.
La solution est finalement arrivée quelques jours plus tard, à la maison et tout bêtement en changeant simplement de verre .
La même bière, venant d’un fût restant, servie dans les mêmes conditions (le fût toujours à 5°C) mais dans un autre verre, d’une toute autre forme et marqué d’une harpe .Le résultat ? Le jour et la nuit !
La pinte n’est maintenant plus qu’une formalité, tirée tellement facilement qu’on se croirait presque à St James Gate, la vue sur Dublin en moins…
Comme quoi, nous savions tous que certaines de nos bières « sauvages » se servent plus facilement en calices qu’en flûtes, mais pour les Stout tirées à l’azote je pensais réellement qu’il en serait autre.
Ce n’est visiblement pas le cas et il faut croire que définitivement, comme l’habit fait le moine, le verre fait aussi la bière !