Urbanex à la brasserie Fischer
Mardi 29 novembre 2016, par Les brasseries
//Une "urbanex" dans les locaux désaffectés de la brasserie Fischer ? Quelle proposition que voilà ? Hop ! J’accepte, bien sur ! Pour les novices comme moi, une urbanex, ou exploration urbaine consiste à visiter ce que l’on appelle une friche industrielle, une usine laissée à l’abandon. Une aventure bien souvent marquée par des cicatrices historiques et économiques, en plein coeur de nos villes modernes.
- la place centrale
L’entrée est quelque peu dérobée, et il faut jouer de notre souplesse pour pénétrer l’enceinte close de l’ancienne brasserie Fischer, au centre de Schiltigheim, à la périphérie de Strasbourg. Le lieu est interdit, pour des raisons évidentes de sécurité, mais il est tout de même fréquenté : récupérateurs de métaux, adolescents urbains en mal de terrain de jeu... et explorateurs curieux.
Le moment de trouver une ambiance, étrange, d’un lieu qu’on sent si chargé d’histoire et grouillant d’activité et qui, désormais, est rendu à la nature. Les bâtiments sont ouverts, portes défoncées. D’un cotés l’administration, bureaux en vrac, renversés par des olibrius, montagnes de livres techniques, tous signés au crayon de papier d’un certain M. Débus, figure bien connue de la brasserie alsacienne, et longtemps directeur de la brasserie Fischer. On peut découvrir aussi les lieux communs, salle de bal, salles de réception... installations d’un autre temps, ou la vie dans l’usine se mêlait de façon plus intime à la vie des familles des ouvriers.
- Porte de la "cave aux houblons"
- Lieu de stockage du houblon, enterré et secret.
Et de l’autre coté les bâtiments techniques, immenses, dépouillés de leur cuves, de leur pompes, et autres canalisations. L’endroit est réellement impressionnant : la multitude de salles démontre que l’activité était foisonnante à une autre époque.
- les caves...
Quelques escaliers mènent au sous sol. Les caves s’étendent sous la ville, elles parcourent des kilomètres, selon des légendes urbaines locales. Des histoires racontent les effondrements de parties de rues, ou de jardin. D’aucuns auraient vu des arbres disparaitrent dans des trous nés au sein de la nuit alsacienne. Ces souterrains ont connus plusieurs utilités au cours des années d’activités de la brasserie. Selon les dires des anciens, avant l’avènement du froid industriel, la fabrication des lagers devait être assurée sur une longue période de l’année. Dans ce but, les paysans inondaient les champs durant l’hiver, les laissaient geler , et la glace était découpée, transportée et entreposée dans les caves de la brasserie, l’isolation était assurée par des couches de paille. Ainsi, la brasserie pouvait réguler une grande partie de l’année la température des fermenteurs emplis de lager.
L’ensemble de la brasserie est livré aux artistes de rue qui osent franchir le pas de la porte (ou qui osent écarter les pans de grillage...). Le "fischermanele", éternel emblème de la brasserie a été détourné de son design original pour intégrer une attitude plus...cool ?
Parsemés sur l long de notre exploration, les restes d’emballages de fournitures industrielles aux marques que nous connaissons bien : Pelliconi pour les capsules, Fermentis pour les levures...
Sur le sol trainent des recettes (oui...), des centaines de feuilles de suivi de brassage, dernières traces de l’activité, avec les listes des ingrédients, secrets dévoilés aux yeux de tous...
En conclusion, une très belle journée dans le froid alsacien, des découvertes intéressantes sur l’histoire d’un lieu mythique de la brasserie locale. Sans avoir connu la belle époque, les souvenirs toujours excellents des anciens employés de fischer croisés au fil des foires européennes, et racontés avec enthousiasmes, sont de véritables madeleines de Proust dans cet endroit chargé d’histoire.